M.J. Arlidge – Am Stram Gram…

Au début, une jeune fille émerge de la forêt. Elle est traumatisée, sale et amaigrie. Elle est près de la mort. Il est clair qu’elle a passé plusieurs jours dans le froid, sans boire ni manger. Son histoire, lorsqu’on la découvre, errant dans la forêt, et vraiment incroyable. Elle a été enlevée, avec son ami, par une inconnue, une femme, et emprisonnée dans un bâtiment abandonné. Il n’y avait ni eau, ni nourriture, ni chauffage. Tout ce qu’il y avait c’était un pistolet, avec le message disant que si l’un deux tuait l’autre, alors seulement il serait libéré.
« Ce putain de monstre écoutait-il nos cris ? Probablement. Car quand on a fini par se taire, c’est arrivé. Un portable sonnait : durant une seconde merveilleuse, on a cru à l’arrivée des secours. Ensuite on a vu l’écran du téléphone éclairé sur le sol du bassin. Sam n’a pas bougé, alors j’ai couru. Pourquoi moi ? Pourquoi fallait-il toujours que ce soit moi ?
— Par terre, à côté du téléphone, tu trouveras un flingue. Il y a une balle dedans. Pour Sam ou pour toi. C’est le prix de votre liberté. Vous devez tuer pour vivre. Est-ce que tu veux vivre, Amy ? »

Le prix de cette liberté et de la survie n’est-il pas exorbitant ? Car le survivant, d’exécuteur se retrouve dans la peau d’une victime, criminel forcé obligé de vivre avec sur la conscience le poids de son acte.
Il va se produire par la suite d’autres enlèvements, dont les victimes semblent apparemment n’avoir aucun lien entre elles, et la ravisseuse, car c’est une femme, ne laisse aux policiers aucun indice.

« Elle ne voulait pas qu’on l’excite ni qu’on l’émoustille. Elle voulait être punie. Sans jamais aller trop loin, les coups étaient d’une violence implacable. Elle avait le corps pour les supporter – grande, musclée, diablement tonique – et les vestiges d’anciennes cicatrices trahissaient qu’elle n’était pas novice dans le milieu SM.
Pourtant, malgré toutes ses investigations, toutes ses questions soigneusement formulées, il n’y avait qu’une seule chose dont Jake était sûr à son sujet. Une fois, alors qu’elle se rhabillait, sa carte avait glissé de la poche de sa veste. Elle l’avait ramassée en un éclair, croyant qu’il n’avait rien vu. Erreur. Lui qui pensait cerner assez bien les gens, il en était resté comme deux ronds de flan. Sans cette carte, jamais il n’aurait deviné qu’elle était flic. »
Cette personne, accro aux châtiments S.M, n’est autre que le commandant de police Helen Grace, leader d’équipe respectée et efficace, à la fois admirée et crainte en raison de sa conduite irréprochable et de sa détermination.
La série d’autres doubles enlèvements et de meurtres se poursuit et, confusément, Helen sent que les meurtres ont un lien avec elle, et qu’elle est impliquée… Mais à quel titre ?

Le roman est composé de chapitres extrêmement courts, à peine plus de 4 ou 5 pages chacun, ce qui donne à l’ensemble son rythme soutenu, et en fait un « page-turner » extrêmement addictif.
Viennent ponctuer le récit, des chapitres relatant le calvaire d’une toute jeune fille, soumise aux exigences sexuelles de son père, et parfois de son oncle.
« Il avait les mains rêches et poilues et je me rappelle avoir grimacé de douleur quand il m’a fourré son poing à l’intérieur. J’étais encore vierge – j’avais que treize ans – j’étais pas faite pour quelqu’un comme lui. De son autre main il m’enfonçait la tête dans l’oreiller. J’ai fermé les yeux en espérant que j’allais mourir. Que ça allait s’arrêter. Mais non : il continuait, implacable, sans jamais s’arrêter de grogner.
Il a fini par se lasser ou par s’essouffler. Il est descendu du lit en s’essuyant les mains sur son jean et s’est dirigé vers la porte. Je me suis retournée pour vérifier qu’il partait bien et c’est seulement là que je me suis rendu compte qu’il y avait eu du public. Jimmy et deux potes étaient là à regarder, à sourire, à se marrer ensemble. Mon père est passé à côté d’eux et a trébuché en sortant dans le couloir. Jimmy l’a laissé partir, et puis il a commencé à défaire sa ceinture.
Et là j’ai compris que c’était son tour maintenant, et que ça ne faisait que commencer. »
Cette jeune fille, nous ne connaissons pas son identité, ni comment elle se place dans l’enchaînement des faits, mais nul doute qu’un tel traumatisme doit avoir des effets dévastateurs. Et tout au long du roman nous nous posons des questions sur son identité. Est-ce que ces traumatismes ont façonné l’inflexible commandant de police Helen Grace, ou bien la tueuse machiavélique et cruelle  à laquelle ils ont affaire? Sur ce plan, le suspense ne sera levé, comme il se doit, qu’à la toute fin du roman.

Dans ce roman, le scénariste qu’était M.J. Arlidge utilise un style très direct, une narration très simple, et un découpage cinématographique très visuel. Il met également à profit toute sa connaissance des codes du thriller pour nous fournir une galerie de personnages très typés : nous trouvons pêle-mêle Mark, le flic dépressif et alcoolique depuis que sa femme l’a quitté, la journaliste prête à tout pour obtenir « le scoop », une psychologue particulièrement bien renseignée sur les activités de la police et donc une suspecte en puissance.

L’héroïne Helen Grace n’a pas les travers habituels des héros de roman noir, tels que la boisson ou la drogue, mais elle traîne derrière elle d’autres problèmes, qui se feront jour au cours du roman et qui peuvent expliquer son caractère d’acier. C’est un personnage de femme-flic tout à fait attachante, belle, intelligente, efficace, avec ce qu’il faut de mystère dans son passé pour nous donner envie de mieux la connaître. et que nous retrouverons dans trois autres aventures.

Thriller psychologique machiavélique et diabolique, ce roman est un concentré d’émotions fortes, agrémenté d’un poil de violence et de perversité, à dévorer d’une seule traite…
Un excellent moment de lecture.

Éditions Les Escales, 2015

4ème de couv.

amstramgramDeux jeunes gens sont enlevés et séquestrés au fond d’une piscine vide dont il est impossible de s’échapper. À côté d’eux, un pistolet chargé d’une unique balle et un téléphone portable avec suffisamment de batterie pour délivrer un terrible message :  » Vous devez tuer pour vivre.  » Les jours passent, la faim et la soif s’intensifient, l’angoisse monte. Jusqu’à l’issue fatale.
Les enlèvements se répètent. Ce sont les crimes les plus pervers auxquels le commandant Helen Grace ait été confrontée. Si elle n’avait pas parlé avec les survivants traumatisés, elle ne pourrait pas y croire.
Helen connaît les côtés sombres de la nature humaine, y compris la sienne ; pourtant, cette affaire et ces victimes apparemment sans lien entre elles la laissent perplexe.
Rien ne sera plus terrifiant que la vérité.

L’auteur :

ArlidgeRomancier et scénariste, M. (Matthew) J. Arlidge travaille pour la télévision depuis quinze ans.
Il dirige également une maison de production indépendante, qui a permis à plusieurs séries policières de voir le jour.
Am Stram Gram est son premier roman.
Trois autres romans, mettant en scène Helen Grace, n’ont pas encore été traduits.
– Pop Goes the Weasel (Helen Grace #2)
– The Doll’s House (Helen Grace #3)
– Liar, Liar (Helen Grace #4)

17 réflexions sur “M.J. Arlidge – Am Stram Gram…

  1. Moi, je n’ai pas aimé le tour de passe-passe de la fin ! Là, j’ai trouvé que l’auteur se foutait de ma gueule royalement. La fliquette ne m’a pas plu non plus, trop border line, le SM un peu trop exposé, très cliché aussi et parfois bête dans ses emportement (lorsqu’elle suspecte un membre) et ensuite, « ooooh, pardon, excuse-moi je le ferai plus ». Bref, ça m’a fait passer le temps, mais sans plus.

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  2. Dis donc, mon ami Vincent, tu en as de ces lectures, je ne sus pas trop habitué à ça. Un livre sans doute très efficace mais n’est-on pas trop proche de la caricature, des effets de manche ? Et puis,rien que le viol à la chaîne me fait tourner le dos mais je sais que tu ne m’en veux point. Bises, mon pote.

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    • Pourquoi t’en voudrais-je, l’ami Jean? Je dois reconnaître que l’auteur a un certain savoir-faire, hérité de son passé de scénariste de télévision. C’est vrai, efficace, mais à dire vrai, je ne ferais pas une habitude.
      Je reviens à des lectures plus « tranquilles ».
      La bise l’ami… 🙂

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