Craig Johnson – Tous les démons sont ici

Dans le cadre d’une mission inter juridictionnelle, Walt et son adjoint Sancho « le Basque » Saizarbitoria sont en charge d’un groupe de prisonniers, qu’ils doivent transférer au FBI. L’un d’entre eux, Raynaud Shade, indien Crow canadien, est un dangereux psychopathe. Lors de son arrestation il avait confié à la psychologue du FBI avoir assassiné un jeune indien, Owen White Buffalo, et l’avoir enterré dans la région sauvage des Cloud Peak Wilderness. Peu de temps après le transfert, l’inévitable se produit: les prisonniers s’évadent, après avoir blessé l’officier du FBI, et pris 3 policiers en otage. Walt confie le blessé à la garde de son adjoint Sancho et seul, avec pour tout soutien un exemplaire de « La divine comédie » de Dante, il se lance à leurs trousses dans les montagnes, au beau milieu d’une tempête de neige.

Alors qu’il progresse dans sa poursuite, que les premiers effets de la fatigue et de l’hypothermie se font sentir, la frontière entre le rêve et la réalité devient de plus en plus floue.
Il entend les voix des esprits indiens qui le guident, à travers le blizzard glacé. Virgil White Buffalo, un « Foutrement Balèze d’Indien » que nous avions rencontré lors d’un roman précédent, l’accompagne dans cette périlleuse expédition. Il disparaît, et réapparaît au moment opportun où Walter en a le plus besoin, quand son état d’épuisement est tel qu’il pourrait s’abandonner à la mort glacée qui l’entoure, lui donnant l’élan nécessaire pour continuer sa chasse.

En équilibre à la frontière de deux mondes, perdu dans un endroit où « L’enfer est vide, tous les démons sont ici  (Shakespeare, La tempête) », quelle est la part du rêve et de l’imagination dans tout ce qui lui arrive ?

 « …je me rappelai la dernière fois que j’étais monté aussi haut et le fait que les choses n’avaient pas bien tourné, et que, en plein blizzard, j’avais dû ramener sur mon dos deux hommes depuis Lost Twin Lakes. Cela avait été difficile, mais ce n’était pas ce souvenir qui m’immobilisait pour le moment.
Dans ces circonstances, qui dataient de plusieurs mois, j’avais vu et entendu des choses, des choses que je n’avais jamais vues ni entendues auparavant et qui continuaient à me hanter. »

Librement inspiré par l’Enfer de Dante, cette randonnée solitaire à travers les montagnes des Big Horns balance entre le récit de survie et l’introspection existentielle de Walt. Johnson nous offre ici un conte magistral sur le combat inégal d’un homme poussé par sa quête de justice. Face à son ennemi, face à la rigueur de la nature, en proie avec ses propres démons, il ne faiblit pas, guidé par les voix intérieures.
Certes, certains pourront m’objecter que par certains côtés, ce roman manque de crédibilité, mais là n’est pas le plus important. Le mysticisme de Walt, très marqué par la culture indienne, sa capacité d’entendre les voix d’esprits indiens morts depuis longtemps sont partie intégrante de son personnage, et ce depuis « Little bird », le premier roman impliquant Walt Longmire. Et Craig Johnson est un maître conteur, qui réussit comme personne à nous transporter dans ces contrées sauvages et inhospitalières de l’Ouest américain.

Walt Longmire, privé de ses habituels soutiens, porte à bout de bras ce formidable récit, et moi, inconditionnel de Craig Johnson et de son héros, j’adore !
Je ne peux faire mieux que de vous le recommander, et vous souhaiter de prendre autant de plaisir que moi à sa lecture.

Éditions Gallmeister, 2015

 

Éditions Gallmeister, 2015

4ème de couv:

Indien Crow d’adoption, Raynaud Shade est considéré comme le plus dangereux sociopathe des États-Unis et représente le cauchemar de tout policier. Finalement interpellé, il avoue avoir enterré un cadavre au beau milieu des Bighorn Mountains, dans le Wyoming, et c’est à Walt Longmire que revient la tâche d’escorter Shade, en plein blizzard, jusqu’au corps. Mais le shérif sous-estime peut-être les dangers d’une telle expédition. Car pour tenter de rétablir la justice, il va devoir braver l’enfer glacial des montagnes et tromper la mort avec, pour seul soutien, un vieil exemplaire de La Divine Comédie de Dante.
Dans ce nouveau volet des aventures de Walt Longmire, Craig Johnson transforme le lumineux décor des Hautes Plaines en un inquiétant théâtre des ombres, dans un polar sous très haute tension. Le gang s’adjoint également les services d’un jeune dandy ambitieux et désargenté, attiré par la promesse d’une rétribution alléchante. Peu d’entre eux survivront à la sanglante confrontation dans les badlands de Catacumbas. Un western impitoyable qui balaie tout sur son passage, comme un film de Tarantino au volume poussé à fond.

L’auteur :

Craig Johnson, né le 1er février 1961, est un écrivain américain, auteur de romans policiers, connu pour sa série de romans et de nouvelles consacrés au shérif Walt Longmire.
Avant d’être écrivain, il exerce différents métiers tels que policier à New York, professeur d’université, cow-boy, charpentier, pêcheur professionnel, ainsi que conducteur de camion et il a aussi ramassé des fraises. Tous ces métiers lui ont permis de financer ses déplacements à travers les États Unis, notamment dans les États de l’Ouest jusqu’à s’installer dans le Wyoming où il vit actuellement. Toutes ces expériences professionnelles lui ont servi d’inspiration pour écrire ses livres et donner ensuite une certaine crédibilité à ses personnages.

 

Craig Johnson – Molosses

« J’avais du mal à obtenir une réponse claire de la part du petit-fils et de son épouse : pour quelle raison leur grand-père s’était-il retrouvé attaché au bout d’une corde de nylon de 35 mètres de long au pare-chocs arrière de l’Oldsmobile Toronado de 1968 ?
– — Alors, lorsque vous avez freiné au stop, il s’est écrasé contre l’arrière de la voiture ?»

Sixième roman de la série mettant en scène le shérif Walt Longmire, cet opus  démarre d’une façon plutôt inattendue, sur le ton de la comédie. Le grand-père au bout de la corde de nylon est Geo Stewart, propriétaire de la casse automobile et de la déchetterie ou, comme il aime à le rappeler, du Site municipal de dépôt, tri et récupération des déchets. Geo Stewart est en conflit de voisinage avec Ozzie Dobbs Jr, qui voudrait bien obtenir le déplacement de la casse et de la déchetterie pour étendre son complexe immobilier.

« On ne l’appelait pas un projet immobilier, mais c’en était un effectivement – si on acceptait cette appellation s’agissant de petits ranches de deux hectares avec des demeures à quatre millions de dollars disposées le long d’un golf. »

Dans le même temps, le shérif Longmire est appelé à la déchetterie, pardon, au Site Municipal de dépôt, tri et récupération des déchets, car on vient de retrouver là bas, dans une glacière, un pouce humain.

Walt confie à son adjoint Sancho Saizarbitoria, dit « Le Basque », la mission de retrouver le propriétaire de ce pouce. C’est une manière pour Walt de l’occuper car Sancho traverse une passe difficile depuis qu’il a été blessé lors de l’épisode précédent. Walt soupçonne qu’il est atteint de SSPT (Syndrome de stress post-traumatique). De plus la venue d’un nouveau né à son foyer le perturbe quelque peu.
Côté sentimental, son adjointe et compagne, la piquante Vic Moretti est obsédée par l’achat d’une maison, pour y abriter leur couple. Sa fille Cady prépare son mariage avec Michael Moretti le jeune frère de Vic, sous la houlette d’Henry Standing Bear, l’ami indien de Walt, comme maître de cérémonie (je suis impatient de voir ça !).
Ajoutez à tout ça la découverte dans un tunnel, sous la maison de Dobbs, de « ce qui était, semble-t-il, la plus grande plantation souterraine de marijuana de l’histoire », vous conviendrez avec moi que Walt ne manque pas de sujets de préoccupation.

A chaque fois que je retrouve Walt Longmire, je suis toujours partagé entre deux sentiments : le plaisir de retrouver un ami, et l’inquiétude de savoir comment les années ont passé sur lui. Car, ne nous y trompons pas, Walt n’est plus un jeune homme, et on le retrouve dans ce roman, encore plus cabossé que dans les précédents. Il doit passer des examens médicaux qui doivent confirmer son aptitude à poursuivre son travail, et qu’il essaye d’éviter en usant de tous les prétextes possibles.

Comme toujours chez Craig Johnson, l’écriture est précise et imagée, le ton est chaleureux. On sent de la part de l’auteur une réelle empathie envers ses personnages, même s’il les place parfois dans des situations bien délicates. Outre les personnages habituels de la série, parmi lesquels « le Basque » tient un rôle de premier plan sur cette enquête, on fait la connaissance de « figures » locales de Durant, hautes en couleur et sûrement inspirées par des personnes connues de l’auteur, comme Geo Stewart ou Madame Dobbs, la vieille institutrice de Walt.

Roman policier ou roman western, je me pose à chaque fois la même question. Et s’il est vrai que l’enquête policière a toujours son importance dans le roman, ce qui retient finalement l’attention, c’est sa manière de décrire les grands espaces des hautes plaines de l’Ouest américain, la poésie avec laquelle il nous dépeint son univers, qu’on arrive à trouver beau même lorsqu’il est franchement hostile.

«Nous étions sur le point d’entamer notre seconde semaine de résistance à des températures inférieures à -20 °C, pour la troisième fois de l’hiver ; pendant la journée, elles ne dépassaient jamais un clément -15 °C, soit une température assez douce, et la nuit, elles descendaient à des profondeurs abyssales, en deçà de -40 °C…
On était lundi, la deuxième semaine de février, et les gens parlaient moins, parce que le vent leur arrachait les paroles de la bouche et les expédiait directement jusqu’au Nebraska. J’avais une image de toutes les déclarations et conversations inachevées du Wyoming, empilées le long des talus jusqu’à ce que la neige les étouffe et qu’elles s’enfoncent dans la terre noire. Peut-être renaissaient-elles au printemps comme les fleurs des champs, mais j’en doutais. »

Au fil de ses aventures, Walt m’émeut chaque fois un peu plus. C’est un homme vieillissant, qui malgré les aléas de la vie, continue à aller de l’avant. Et même si ce n’est pas toujours facile, il se lève tous les jours pour accomplir sa mission.

Craig Johnson est un maître conteur qui, dès les premières phrases, vous captive et vous entraîne à la suite de ses héros jusqu’à la toute fin du récit. J’ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce roman, souvent teinté d’humour, qui m’a encore donné l’occasion d’un très bon moment de détente.
Éditions Gallmeister, 2014

4ème de couv :

Alors que l’hiver s’installe dans le comté le moins peuplé de l’État le moins peuplé des États-Unis, Walt Longmire, son shérif, se voit confier une curieuse mission : celle de mettre la main sur le propriétaire d’un pouce abandonné à la décharge. L’enquête devient rapidement haute en couleur, car Walt se trouve face à deux molosses qui gardent le terrain, à son vieux propriétaire loufoque et à un promoteur immobilier multimillionnaire qui cherche à prendre possession des lieux pour étendre son vaste ensemble de ranchs luxueux. Sans parler d’un jeune couple fleurant bon la marijuana, de la vieille institutrice au charme incontesté, du perroquet dépressif et déplumé et de quelques cadavres qui bientôt viennent compliquer cette affaire.

L’auteur :

Craig Johnson, né le 1er février 1961, est un écrivain américain, auteur de romans policiers, connu pour sa série de romans et de nouvelles consacrés au shérif Walt Longmire.
Avant d’être écrivain, il exerce différents métiers tels que policier à New York, professeur d’université, cow-boy, charpentier, pêcheur professionnel, ainsi que conducteur de camion et il a aussi ramassé des fraises. Tous ces métiers lui ont permis de financer ses déplacements à travers les États Unis, notamment dans les États de l’Ouest jusqu’à s’installer dans le Wyoming où il vit actuellement. Toutes ces expériences professionnelles lui ont servi d’inspiration pour écrire ses livres et donner ensuite une certaine crédibilité à ses personnages.

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Craig Johnson – Enfants de poussière

« Grand Esprit, garde-moi de critiquer mon voisin
tant que je n’ai pas marché une heure durant
dans ses mocassins. »
VIEILLE PRIÈRE INDIENNE

C’est toujours avec le même enthousiasme que je commence un nouveau roman de Craig Johnson.

De retour dans son comté d’Absaroka, Wyoming, le shérif Walt Longmire passe le plus clair de son temps libre avec sa fille Cady, en phase de rééducation après la grave agression dont elle avait été victime à Philadelphie (cf son précédent roman « L’indien blanc »).

En bordure d’une route est découvert le corps d’une jeune fille asiatique. A proximité, dans un tunnel sous la route, on trouve un vagabond endormi. Virgil White Buffalo,  bâti en colosse. J’ai appris là une signification inconnue du sigle F.B.I. (Fucking Big Indian). Il donnera bien du mal à Walt et ses adjoints pour se laisser appréhender. Il a en sa possession, le sac à main de la victime, contenant une photo où figure Walt.
« Elle était vieille et décolorée par le soleil, les coins rebiquaient là où l’eau avait imprégné le papier. C’était un instantané d’une femme asiatique perchée sur un tabouret de bar. Elle lisait un journal et un homme était assis devant un piano à sa droite. Il tournait le dos à l’objectif. Il portait un treillis et son visage était un peu caché. Il était grand, jeune, très musclé et il avait un visage d’ange joufflu et une coupe militaire. Et c’était moi. »

A partir de ce moment, le roman bascule, suivant deux strates distinctes du cours de la vie de Walt. Ponctuant l’enquête qui se déroule dans le présent, visant à reconstituer le parcours qui a conduit cette jeune vietnamienne au cœur du Wyoming pour y être assassinée, de nombreux flashbacks jalonnent le récit sur la période où Walt, jeune enquêteur des marines, servait au Vietnam.
Cette partie du roman, rendue de façon très réaliste, nous montre un Walt déjà très concerné par les notions de justice, du bien et du mal, traits de caractère bien présents chez le Walt que nous connaissons.

Dans ce roman je retrouve les thèmes chers à Craig Johnson : le culte de l’amitié, la force que donne la sensation d’appartenir à un groupe, une communauté. Et il porte toujours ce regard plein de bienveillance envers la population indienne. Il nous décrit un univers de western, où les 4×4 ont remplacé les chevaux et les chariots, où les communications sont à l’heure de l’internet et du WiFi, quand le réseau est accessible…
Je perçois toujours cette nostalgie du vieil Ouest, et cette façon qu’il a de magnifier la nature sauvage et les grands espaces, quand il nous emmène dans la ville fantôme de Bailey, peuplée de serpents à sonnettes, ou bien dans les Big Horn Mountains, au « Hole in the Wall », rendu célèbre par la bande de Butch Cassidy et Sundance Kid, qui y avaient établi leur repaire.

Le thème principal de ce roman tourne autour des « enfants de poussière », vocable poétique qui désigne les jeunes métis nés de mère vietnamienne et de père américain. Ces enfants, rejetés dans leur propre pays, cherchent à gagner l’Amérique pour y faire leur vie, fournissant ainsi à leur insu la matière première pour un gigantesque trafic d’êtres humains, pour alimenter les réseaux de prostitution.

« Elle cala mon autre bras dans son dos et m’emporta dans une valse fantaisiste, son visage calé contre mon épaule. Nous tournions dans la salle de bal vide et silencieuse, et je pensais à Virgil White Buffalo et je regardais ma fille, qui levait la tête et souriait. Une fois que nous eûmes parcouru tout le salon, je me penchai pour déposer un baiser sur la cicatrice en U à la racine de ses cheveux et m’efforçai de me concentrer sur tous les bonheurs de ma vie. »
Son attitude de père envers Cady a évolué depuis qu’il a failli la perdre. Il s’inquiète pour elle et il réalise l’importance qu’elle a dans sa vie. Il dégage aussi beaucoup de complicité, de tendresse et d’humour à l’égard de Vic, et des autres personnages qui gravitent autour de lui. Il entretient avec Henry Standing Bear une amitié de longue date, ambivalente, à laquelle se mêle une certaine rivalité.

De par son évocation du Vietnam, l’auteur plonge plus profondément dans le passé de Walt, ajoutant une couche supplémentaire à l’épaisseur du personnage. Mais malgré la force tranquille dont il fait preuve, Walt demeure toujours en proie à l’introspection et aux questionnements.
« Je me demandais ce que j’aurais dit à ce marine au visage poupin, et ce que je ne lui aurais pas dit. Je me demandais ce qu’il aurait eu à me dire. Est-ce qu’il aurait approuvé ce que nous étions devenus ? Est-ce qu’il aurait pensé que j’étais quelqu’un de bien ? »
Je te rassure tout de suite Walter, tu es devenu quelqu’un de bien, de très bien même.

Une très belle lecture, en vérité.

Éditions Gallmeister, Février 2012

 

4ème de couv:

enfants de poussièreDans le comté d’Absaroka, Wyoming, la découverte du corps d’une jeune Asiatique étranglée en bordure de route n’est pas monnaie courante. Et quand on retrouve près des lieux du crime un vagabond indien au physique de colosse, Virgil White Buffalo, en possession du sac à main de la victime, l’affaire semble être vite expédiée. Pourtant, le shérif Longmire a du mal à croire que Virgil soit l’assassin, d’autant que dans le sac à main de la morte, on découvre un vieux cliché qui le ramène à sa première enquête criminelle, près de quarante ans plus tôt, en pleine guerre du Vietnam.

Enfants de poussière est un polar haletant qui nous entraîne des boîtes de nuit de Saïgon aux villes fantômes du Wyoming. Ce nouveau volet des aventures de Walt Longmire est l’un des plus ambitieux de son auteur.

L’auteur:

Craig JCraig Johnson, né en 1961 , est un écrivain américain, auteur de romans policiers, connu pour sa série de romans et de nouvelles consacrés au shérif Walt Longmire.
Avant d’être écrivain, il exerce différents métiers tels que policier à New York, professeur d’université, cow-boy, charpentier, pêcheur professionnel, ainsi que conducteur de camion et il a aussi ramassé des fraises. Tous ces métiers lui ont permis de financer ses déplacements à travers les États Unis, notamment dans les États de l’Ouest jusqu’à s’installer dans le Wyoming où il vit actuellement. Toutes ces expériences professionnelles lui ont servi d’inspiration pour écrire ses livres et donner ensuite une certaine crédibilité à ses personnages.
Déjà parus : Little bird (2009), Le camp des morts (2010), L’indien blanc (2011), Enfants de poussière (2012), Dark horse (2013), Molosses (2014), Tous les démons sont ici (2015), Steamboat (2015)
A paraître: A vol d’oiseau (mai 2016)
(Source: Wikipedia)

Craig Johnson – Le camp des morts

A peine un mois après les évènements décrits dans le roman précédent « Little bird », Walt Longmire est appelé à la maison de retraite de Durant. Mari Baroja, une vieille femme d’origine basque a été retrouvée morte. Bien qu’il n’y ait pas de signes apparents de violence, Lucian Connally demande à Walt de traiter ce cas comme un meurtre.

Il s’avère que Lucian connaît bien cette femme. Cinquante ans auparavant, ils ont connu un grand amour, ont été mariés (trois heures !) avant que ses oncles ne lui infligent un sévère passage à tabac, ne fassent annuler le mariage, et ne la marient rapidement.

Walt va se plonger dans le passé de la victime, qui est aussi celui de Lucian, et découvrir qu’en plus de la petite maison modeste où elle vivait, Mari possédait des hectares de terre avec des gisements de méthane, ce qui donnerait un excellent mobile pour un meurtre. Les résultats de l’autopsie montrent qu’elle a été empoisonnée et a été victime de violences répétées durant de longues années.

Et quand les cadavres commencent à s’additionner, Walt se rend compte qu’il ne connaît pas son ami Lucian aussi bien qu’il le pensait, et que le vieil homme lui a caché bien des choses de sa vie passée, entre autres qu’il déjeunait avec la victime tous les jeudis.

Walt ne s’est pas encore remis de la précédente affaire, au cours de laquelle il a rencontré, et perdu un être qui lui était devenu très cher. Le souvenir de Vonnie est encore très présent en lui et il traîne sa grande carcasse de cow-boy mélancolique et meurtri, qu’il considère sans indulgence.
« Je regardai mon visage dans la glace. Il n’était pas mal, si l’on exceptait le fait qu’il avait besoin de huit heures de sommeil d’affilée, d’une coupe de cheveux, de dix kilos et dix ans de moins. Mon menton était trop fort, mes oreilles trop grandes, et mes yeux étaient trop enfoncés dans leurs orbites. »

L’auteur nous offre une galerie de personnages d’une formidable épaisseur : Ruby, la standardiste du bureau dont il a hérité en prenant son poste, qui est un peu sa nounou. Son adjointe italo-américaine Vic Moretti,  grande gueule, récemment divorcée, avec laquelle il y a une drôle d’alchimie, on sent qu’il est attiré par elle, mais en même temps il la tient à distance.
« Dans les faibles lueurs colorées de la lampe au-dessus de la table de billard et des publicités Rainier, ma première adjointe ressemblait à une courtisane de la Renaissance, de celles qui seraient capables de mettre du poison dans votre vin. »

Dans cette enquête, Walt engage à l’essai et fort à propos un nouvel adjoint, Santiago « Sancho »Saizarbitoria, dont la connaissance de la langue basque – l’euskara – leur sera précieuse.
« Il rit et j’observai le jeune homme brillant assis en face de moi. Je me sentais comme Monsieur de Tréville, en présence du jeune Gascon. C’était dur de ne pas y penser, vu son bouc Vandyke et la lueur malicieuse que je voyais dans ses yeux. Je me demandai si, comme d’Artagnan, il allait devenir extrêmement pénible. »

Craig Johnson situe son enquête policière  dans une nature sauvage, dans la neige et le blizzard glacial de l’hiver, quand le moindre déplacement devient une aventure. Il nous décrit la société rurale du Wyoming et les interactions entre les diverses communautés qui y vivent en harmonie, héritage d’un grand brassage de races et de cultures, depuis les diverses tribus indiennes jusqu’aux « mexicains des montagnes » (les Basques), population immigrée dans le pays au XIXème siècle.

Et surtout ce ton un peu décalé, cet humour pince sans rire qui vient ajouter au récit un peu de piment, basque bien sûr, et qui vient tempérer la dureté de certaines scènes.
« Est-ce que ce gamin sait qu’après la neige qui va tomber cette nuit, un Peau-Rouge de deux mètres cinquante en aura jusqu’au trou de balle? »

Comme James Lee Burke avec la Louisiane, Craig Johnson est très attaché à sa région qu’il met en scène avec un amour et un savoir faire évidents.
Les paysages hivernaux et glacés du Wyoming, l’intrigue, et la qualité des personnages font de cette magnifique histoire extraordinairement dense, un roman doux-amer, mais d’une grande beauté.
Je recommande chaudement, si j’ose dire…

Éditions Gallmeister, 2010

4ème de couv.

le camp des morts1Lorsque le corps de Mari Baroja est découvert à la maison de retraite de Durant, Wyoming, le shérif Walt Longmire se trouve embarqué dans une enquête qui le ramène cinquante ans en arrière. Il plonge alors dans le passé déchirant de cette femme et dans celui de son mentor, le légendaire shérif Lucian Connally.
Tandis que résonne l’histoire douloureuse de la victime trouve peu à peu une résonance dans le présent, d’autres meurtres viennent jalonner l’enquête. Aidé par son ami de toujours, l’Indien Henri Standing Bear, le shérif mélancolique et désabusé se lance à la poursuite de l’assassin à travers les Hautes Plaines enneigées.
Ce deuxième volet des aventures de Walt Longmire, nous entraîne au cœur d’une violence tapie dans les paysages magnifiques du Wyoming.

L’auteur :

Craig JCraig Johnson, né le 1er février 1961 , est un écrivain américain, auteur de romans policiers, connu pour sa série de romans et de nouvelles consacrés au shérif Walt Longmire.
Avant d’être écrivain, il exerce différents métiers tels que policier à New York, professeur d’université, cow-boy, charpentier, pêcheur professionnel, ainsi que conducteur de camion et il a aussi ramassé des fraises. Tous ces métiers lui ont permis de financer ses déplacements à travers les États Unis, notamment dans les États de l’Ouest jusqu’à s’installer dans le Wyoming où il vit actuellement. Toutes ces expériences professionnelles lui ont servi d’inspiration pour écrire ses livres et donner ensuite une certaine crédibilité à ses personnages.
(Source: Wikipedia)

Craig Johnson – Little bird

LITTLE-BIRD4ème de couv.

Après vingt-quatre années au bureau du shérif du comté d’Absaroka, Walt Longmire aspire à finir sa carrière en paix.
Ses espoirs s’envolent quand on découvre le corps de Cody Pritchard près de la réserve cheyenne. Deux ans auparavant, Cody avait été un des quatre adolescents condamnés avec sursis pour le viol d’une jeune Indienne, un jugement qui avait avivé les tensions entre les deux communautés. Aujourd’hui, il semble que quelqu’un cherche à venger la jeune fille. Alors que se prépare un violent blizzard, Walt devra parcourir les vastes étendues du Wyoming sur la piste d’un assassin déterminé à parvenir à ses fins.

Ce que j’en pense:

Je fais connaissance avec Craig Johnson par le biais de ce roman, le premier de  la série consacrée à son héros Walt Longmire.

Avec la découverte du cadavre de Cody Pritchard, il s’avère que l’enquête promet d’être un brin compliquée pour Walt. L’arme et le calibre utilisés, ainsi que la plume d’aigle près du corps, semblent orienter l’enquête vers la nation Cheyenne, ce qui paraît vraiment trop évident.

Notre shérif, depuis le décès de sa femme 4 ans plus tôt, a une tendance certaine à se laisser aller. Sa relation avec sa fille adulte est un désastre, et sa vie sentimentale et sociale un désert. Seul Henry Standing Bear, son vieil ami indien, avec qui il a en commun l’expérience de la guerre au Vietnam, arrive encore à avoir sur lui une certaine influence, pour le « civiliser » un peu.

La victime, un des violeurs de Melissa Little Bird, n’avait montre d’aucun remords pendant le procès. Son attitude avait même exacerbé la rancoeur des habitants de la réserve indienne. Il y a donc bon nombre de suspects pour garder Walt et son équipe occupés pendant une bonne partie de l’histoire. Également assez de fausses pistes, de mensonges dispensés au fil des chapitres pour nous tenir en haleine tout au long du roman.

Situé dans des paysages sauvages, dans la petite ville d’Absaroka, le charme de ce roman tient à ses personnages, pour la plupart des solitaires ou des excentriques. Chacun des personnages prend sa place dans l’histoire, et comme c’est le premier roman d’une série, on se doute qu’ils vont prendre de l’importance au fil des épisodes suivants : De Ruby, la réceptionniste du bureau du shérif, et Henry Standing Bear, son vieil ami indien, qui est un peu sa conscience, à Vic Moretti, son adjointe fraîchement débarquée de la côte est et dont il est clair qu’elle pourrait lui succéder. Tous les personnages sont fascinants et l’auteur a le don de leur donner du réalisme et de la vie aux yeux du lecteur.

L’écriture est sobre, pleine de petites touches d’humour. L’intrigue très bien construite, menée à un rythme loin d’être endiablé mais c’est ce rythme-là qui convient à ces grands espaces majestueux. Johnson a une maîtrise parfaite du cadre des montagnes du Wyoming et nous offre une belle atmosphère pour situer l’histoire et y faire vivre ses personnages.

Les montagnes, les plaines, les arbres, les différents visages de la neige qui tombe, en flocons ou en blizzard, tout cela s’écoule dans effort du stylo de Craig Johnson. A l’instar d’un James Harrison, James Crumley ou James Lee Burke, il dépeint avec beaucoup de tendresse les habitants de ces terres sauvages où la nature, malgré sa beauté reste très dure envers les hommes qui pourraient la sous-estimer.

C’est aussi une peinture d’une certaine Amérique, où les Indiens sont toujours victimes d’un racisme plus ou moins conscient. Est également abordée la question de leur difficultés d’intégration. Mais l’auteur ne tombe pas dans l’erreur du stéréotype de « l’Indien », avec son cortège de problèmes sociaux dont le personnage de Little Bird, la petite fille attardée souffrant d’alcoolisme fœtal, est un criant exemple. Les Indiens qu’il nous donne à connaître sont avant tous des gens normaux, avec des problèmes humains.

Le titre original  » A cold dish » (un plat froid), fait référence à la vengeance:
« Je me mis à penser aux vieux Cheyennes… Ce n’était pas que la vengeance était un plat qui se mangeait de préférence froid, c’était un plat qu’il valait mieux ne pas servir du tout. Je pensai à ce que voulaient vraiment les vieux Cheyennes. Les morts veulent seulement la même chose que les vivants: qu’on les comprenne. »

Une très bonne lecture qui, pour ma part, ne restera pas sans suite. Je recommande sans réserve.

Craig JL’auteur :
Craig Johnson, né le 1er février 1961 , est un écrivain américain, auteur de romans policiers, connu pour sa série de romans et de nouvelles consacrés au shérif Walt Longmire.
Avant d’être écrivain, il exerce différents métiers tels que policier à New York, professeur d’université, cow-boy, charpentier, pêcheur professionnel, ainsi que conducteur de camion et il a aussi ramassé des fraises. Tous ces métiers lui ont permis de financer ses déplacements à travers les États Unis, notamment dans les États de l’Ouest jusqu’à s’installer dans le Wyoming où il vit actuellement. Toutes ces expériences professionnelles lui ont servi d’inspiration pour écrire ses livres et donner ensuite une certaine crédibilité à ses personnages.
(Source: Wikipedia)